C’est sans doute la première fois que l’humoriste Abdelkader Secteur se produit sur la scène boisée du théâtre de Rabat, mais on en a la certitude, c’est le spectacle le plus hilarant de ce début de saison artistique. Marrakech lui avait déjà ouvert une brèche. Ce diable de conteur, svelte et tout vêtu de noir a séduit le plus large des publics des deux sexes avec une dominante pour les silhouettes jeunes dont on sait d’avance qu’elles sont des inconditionnelles du Rai. La salle basse et les deux gradins ont été archicombles. Certains ont dû acheter le ticket au marché noir à la coquette somme de 500 dirhams. Le Gad el Maleh algérien, exilé artistique volontaire nous a montré de quels déboires il s’échauffait. On s’esclaffait au rythme d’un rire par seconde. Ce qui constitue une prouesse digne d’éloge. Le one-man-show thématisé à juste titre «La vie de chien» parle d’hommes infortunés mis aux abois par les circonstances contrariantes. Abdelkader nous avait raconté avec le patois algérien si reconnaissable par son «ârancia» (mélange de l’arabe et du français) ses mésaventures où un certain Ahmed, personnage grossier et désinvolte ne fait qu’empirer les choses. Son profil brossé satiriquement avec un faciès émacié et longiligne nous faisait penser au quatrième Dalton dont la hauteur da sa taille est le double du nain moustachu. Abdelkader le Lucky Luck de la drôlerie a réussi à captiver l’auditoire. Son «One Abdelkeder Show» a fait pleurer de rire l’assistance notamment quand il s’attaqua à la boulimie gargantuesque de certains pères de familles qui, endormis avec le ventre plein de victuailles, ils voient de mauvais rêves comme par exemple phagocyter un bateau pétrolier. Les Fayots pimentés plus Ragoût plus Raiby cela donne des cauchemars au cœur de la nuit. Le chien à saucissonner, la voiture dotée de computer de contrôle et qui parle d’une « voie barbue » et puis les funérailles comparées sont autant de sujets comiques abordés avec un style aigre doux. L’argot dont l’artiste s’était servi n’a pas gêné sa prestation. Il y a quelque chose de médicamenteux dans ses gags. On peut dire sans risque de se tromper qu’ils sont un remède contre le stress. A la sortie de la salle les gens avaient l’air heureux. C’était comme s’ils sortaient d’une cure de jouvence toute faite de fou rire et de délassement. Si le vieux Cheb Khaled et Bilal sont à leur énième apparition au Maroc, on ne peut que souhaiter la bienvenue au faiseur de rire Abdelkader, pourvu qu’il enchaîne avec d’autres spectacles comiques de même facture en tachant d’élargir l‘éventail thématique car d’autres sujets et d’autres phénomènes sociaux méritent d’être appréhendés avec causticité, ces domaines sont restés en friche. On voudrait d’autres sketchs plus impersonnels, loin des confidences faussement vraies genre: mon père qui ressemble à Lee Van Cleef faisait ceci et Yemma disait cela. Avec son punch, Abdelkader nous a fait subitement penser à Ahmed Senoussi, l’oublié des tréteaux et medias audio-visuels marocains. L’on souhaite qu’avec les révisions en cours, on nous redonne l’occasion de revoir l’auteur comique de «La Fête du Loup». Ainsi, réuni sur un même plateau le duo ferait rire à tordre le cou des milliers de spectateurs maghrébins. Ainsi, comme nous l’avions déjà mentionné dans d’autres chroniques: par les temps maussades qui courent le rire est devenu une denrée si rare et si précieuse. »
RAZAK
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